LE CERCLE DES JUGES CONSULAIRES DE PARIS
1 quai de la Corse
75004 Paris
N°TVA :

Association CHAMBRE DE COMMERCE FRANCE-ISRAEL c/ SAS COGES, Sté DRACO intervenante volontaire RG 2024037849 – ordonnance du 18 juin 2024

Mots-clés :
COMPETENCE / Compétence d’attribution
IRRECEVABILITE /Défaut d’intérêt ou de qualité à agir (ou à défendre)
CONTRATS ET OBLIGATIONS : Illicéité

Sommaire

Illicéité d’une mesure administrative instaurant une discrimination fondée sur la nationalité de personnes morales ; la mise en œuvre de dispositions pénalement répréhensibles est constitutive d’un trouble manifestement illicite. 

La COGES est en charge de l’organisation du salon Euro Satory, le plus grand salon mondial de matériels militaires terrestres, qui se déroulait du 17 au 21 juin 2024. A la suite de déclarations orales des autorités publiques, confirmées par une lettre du 16 juin 2024, à la veille de l’ouverture du salon, du délégué général à l’armement, COGES a annoncé aux sociétés israéliennes, qui avaient loué un stand, qu’elles ne pourraient ni le monter, ni exposer leur matériel et que les délégations israéliennes ne pourraient pas y être accueillies.

Soutenant qu’il s’agissait de mesures illicites, constitutives d’une discrimination et d’une entrave à l’exercice normal d’une activité économique en raison de l’origine et de la nationalité des personnes ainsi exclues, la Chambre de Commerce Franco-Israélienne, ci-après la CCFI, et DRACO, sté de droit israélien, ont demandé au juge des référés d’ordonner la cessation de ces pratiques.

Le juge des référés a fait droit à la demande : 

  • Compétence : Il constate tout d’abord que le litige dont il est saisi oppose une association, personne morale de droit privé ayant une option de compétence lui permettant d’agir indifféremment devant le tribunal judicaire ou devant ce tribunal, demanderesse, à une société commerciale ayant son siège à Paris, défenderesse. Il s’en infère, sur le fondement des articles L.721-3 du code de commerce et 42 CPC, que ce tribunal est compétent.
  • Recevabilité : le juge :
    1. Rappelle que l’article 31 CPC édicte « l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès d’une prétention » ; 
    2. Constate que les statuts de la CCFI indiquent que l’un de ses objets est de lutter contre toute forme de discrimination, notamment commerciale, et que le litige porte sur le caractère discriminant du refus opposé aux entreprises israéliennes de disposer d’un stand en raison de leur nationalité ;
    3. Dit qu’il en résulte que l’action en justice de la CCFI entre précisément dans l’objet social de ses statuts et qu’elle est donc recevable.
  • Sur l’existence d’un trouble manifestement illicite 
    COGES conteste le caractère illégal des mesures qu’elle a appliquées dès lors qu’elle s’est soumise à une décision d’une autorité administrative.
    CCFI soutient que l’interdiction à une société, en raison de sa nationalité, de participer à une opération commerciale est une discrimination illicite dès lors que ni l’Etat d’Israël, ni ses ressortissants, ni ses entreprises ne font l’objet d’un embargo en France tiré du droit français ou d’une norme internationale.
    Le juge :
    1. rappelle que l’article 225-1 du code pénal édicte que « constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes morales sur le fondement de l’origine de l’appartenance ou non …à une Nation… » et que l’article 225-2 du même code édicte que des sanctions pénales sont encourues par toute personne entravant l’exercice de l’activité économique d’une entreprise motivée par une discrimination au sens de l’article précédent, sanctions pénales aggravées lorsque ce refus discriminatoire est commis aux fins d’interdire l’accès à un lieu accueillant du public ;
    2. constate que les mesures mises en œuvre par COGES, à compter du 31 mai 2024, consistant à rejeter les demandes des entreprises israéliennes à disposer d’un stand pour la seule et unique raison de leur nationalité, constitue une discrimination au sens de l’article 225-1 du code pénal ;
    3. dit qu’il résulte de ce qui précède que COGES, en mettant en oeuvre des mesures illicites et pénalement répréhensibles, a provoqué un trouble manifestement illicite qu’il convient de faire cesser. 
  • A titre surabondant, Sur l’existence d’un péril imminent : le salon a ouvert le 17 juin 2024 et va se tenir jusqu’à la fin de la semaine. Il en résulte que le dommage subi par les personnes morales, déclarées comme israéliennes, va donc s’aggraver depuis ce jour 19 juin jusqu’au 21 juin. Le péril est donc imminent et doit être prévenu sur le fondement de l’article 873 CPC.

En conséquence, le juge dit qu’il est compétent, que la demande de CCFI est recevable, ordonne à COGES de suspendre l’exécution des mesures adoptées à l’encontre des sociétés israéliennes dont les stands ont été prohibés à Euro Satory, et ce jusqu’à la fin du salon.

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