LE CERCLE DES JUGES CONSULAIRES DE PARIS
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LA GROSSE EQUIPE c/ NRJ 12 et CHERIE HD - RG 2022054784 - jugement du 11 septembre 2023

Mots-clés :
RUPTURE BRUTALE / Préjudice
SECRET DES AFFAIRES/instance au fond

Sommaire : Nécessité de justification détaillée du préjudice subi du fait de la rupture brutale et secret des affaires. Protection des documents justificatifs couverts par le secret des affaires.

LA GROSSE EQUIPE produisait depuis une dizaine d’années, de façon régulière, des programmes télévisés pour les chaînes de télévision NRJ 12 et CHERIE HD (appartenant toutes deux au groupe NRJ). Ces dernières ont mis fin, au 31 décembre 2021, aux relations avec LA GROSSE EQUIPE.

Considérant être victime d’une rupture brutale de relations commerciales établies, LA GROSSE EQUIPE réclamait une indemnité de quelque 7 M€ au titre du préavis non accordé, qu’elle estimait devoir être de 18 mois. Pour justifier le montant de ce préjudice, LA GROSSE EQUIPE faisait état du chiffre d’affaires moyen réalisé au cours des dernières années avec ces deux clients et y appliquait un taux de marge de 31 % certifié par son commissaire aux comptes.

Soulevant un incident de communication, les défenderesses alléguaient ne pas disposer des éléments permettant de débattre contradictoirement de cette évaluation, le commissaire aux comptes ne fournissant pas le détail de la comptabilité analytique sur laquelle il se fondait pour parvenir au taux de marge de 31 %, et demandaient, en conséquence, la communication par la demanderesse de sa comptabilité analytique sur les dix dernières années.

La demanderesse s’y opposait, au motif que sa comptabilité analytique, révélant les marges des émissions produites, relevait de son savoir-faire et constituait des informations commerciales confidentielles couvertes par le secret des affaires et que l’attestation de son commissaire aux comptes suffisait pour l’évaluation de son préjudice.

Le tribunal faisait droit à la demande des chaînes de télévision, au motif :

  1. que, comme toute expertise de partie, cette attestation ne pouvait être prise en compte qu’après débat contradictoire entre les parties. 
  2. Et « que les rapports d’expertise privée ne sont réellement exploitables que si les données, les hypothèses, les méthodes et les postulats sur la base desquels ils sont élaborés sont pleinement transparents et explicites, de manière à permettre un débat contradictoire… »,

en concluant que la production de l’attestation du commissaire aux comptes « ne dispense nullement la demanderesse de fournir l’exhaustivité des données communiquées » à ce professionnel. 

Reconnaissant, toutefois, qu’il s’agissait d’une information relevant du secret des affaires, le tribunal en limitait la « communication au tribunal, aux seuls avocats de la défense et, le cas échéant, à l’économiste que pourraient désigner les défenderesses, les soumettant à un engagement de confidentialité *».

*N.B. L’engagement de confidentialité doit être signé par tous les intervenants ci-dessus, y compris les défenderesses elles-mêmes.

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