SAS GAZ de PARIS contre SAS DOMUSVI RG 2024000193 – Ordonnance du 26 janvier 2024
Mots-clés :
IRRECEVABILITE / Référé d’heure à heure
CONTRATS ET OBLIGATIONS / Exécution forcée
Sommaire :
Autorisation d’assigner en référé d’heure à heure
Trouble manifestement illicite résultant d’une violation flagrante du contrat – Poursuite du contrat ordonnée en référé
Litige
Le 27 juillet 2022, Gaz de Paris (GdP) et Domusvi, gestionnaire d’EHPAD, signent un «contrat cadre» de livraison d’un volume CAR (Consommation Annuelle de Référence) de 105 GWh à travers 206 Points De Livraison (PDL) pour une durée allant jusque fin 2024.
Le 18 novembre 2023, GdP constate que l’essentiel (187) des PDL a cessé de s’alimenter auprès de son réseau (sortie de son «périmètre d’équilibre»).
Demande
Poursuite des relations commerciales jusqu’à la décision du tribunal saisi au fond.
Décision
- Recevabilité de la demande,
- Autorisation donnée à GdP de solliciter des opérateurs du réseau Gaz (GRDF) la réintégration immédiate des PDL litigieux dans son périmètre d’équilibre, sous astreinte de 30 K€ pour toute infraction commise postérieurement à la réintégration,
- Décision exécutoire de plein droit en application de l'article 514 du CPC.
Motivation
Recevabilité
GdP demande le maintien du contrat en raison de l'existence d’un dommage imminent et d’un trouble manifestement illicite.
DOMUSVI prétend que GdP serait irrecevable parce qu’il a introduit l’affaire en référé d’heure à heure alors que l’urgence ne le justifiait pas.
Le juge rappelle que la possibilité d’assigner d’heure à heure est une mesure d’administration judiciaire, dont le président est seul juge. Or, il a bien rendu une ordonnance autorisant à assigner d’heure à heure.
Par ailleurs, les considérations sur l’absence de résiliation du contrat et sur la justification et le quantum du préjudice concerneront l’éventuel débat au fond, mais n’ont rien à voir avec la recevabilité de la demande en référé de poursuite du contrat tel que conclu entre les parties.
La demande est donc recevable.
Poursuite du contrat
L’article 9 du contrat cadre stipule que le fournisseur « pourra adapter le périmètre du contrat à l’évolution des besoins de Domusvi, variations, positives ou négatives en volume de consommation par rapport au périmètre initial.
A ce titre, le client aura la faculté d’intégrer ou de supprimer des établissements».
«A ce titre», synonyme de «Pour cette raison», montre que le second alinéa n’est pas autonome du premier. Il n’octroie pas à Domusvi la faculté d’intégrer ou de supprimer des établissements sans vérification des conditions éventuelles prévues à l’alinéa précédent. A contrario, l’adaptation du périmètre du contrat à l’évolution des besoins de Domusvi est une possibilité laissée à GdP en fonction des besoins de Domusvi. Celle-ci n’a donc pas une liberté totale d’entrée ou de sortie du périmètre.
Le retrait en une journée de 91% des PDL du périmètre d’équilibre de GdP ne correspond pas à une évolution des besoins de Domusvi. Il correspond au contraire à une opportunité de profiter, au moment de forte baisse du prix du gaz, de conditions tarifaires plus favorables que celles du contrat cadre.
Avec l’évidence requise en référé, il apparaît que Domusvi a manifestement abusé de la souplesse autorisée par le contrat pour sortir, dans des conditions non prévues, l’essentiel de sa consommation du périmètre du contrat.